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Lucien Magne, pionnier d’une restauration polémique

Restauration Abbatiale 1903

Lucien Magne (1849-1916), grand architecte, auteur et professeur, a dirigé de grands chantiers : au Sacré-Coeur de Paris et à l’Abbaye Royale de Fontevraud où son impulsion fut décisive, notamment pour l’abbatiale et les cuisines romanes. Interview imaginaire…

COMMENT ÊTES-VOUS ARRIVÉ À FONTEVRAUD ?

Lucien Magne : Tout a commencé en 1886. Architecte en chef des monuments historiques, j’y ai réalisé des relevés archéologiques. Au gouvernement, certains pensaient en effet à supprimer les aménagements pénitentiaires. Rappelons que l’abbatiale a été classée sur la première liste des monuments historiques rédigée par Mérimée, dès 1840 ! 

 

Mais il faudra attendre 1903, et la diminution de la population carcérale, pour entamer cette restauration. Inspecteur général du service des monuments historiques pour le département Maine-et-Loire, j’y ai d’abord supervisé les travaux de l’architecte Bruneau. En 1904, quand je suis nommé architecte du Sacré-Cœur de Montmartre, je ne veux pas quitter Fontevraud, qui me fascine ! Pour mener de front les deux chantiers, j’ai choisi de conjuguer les fonctions d’architecte en chef et d’inspecteur général des monuments historiques.

POURQUOI VOUS ÊTES-VOUS CONCENTRÉS SUR L’ÉGLISE ABBATIALE ET LES CUISINES ROMANES ?

Lucien Magne : Il y avait tant à faire… Dans l’abbatiale, j’ai fait démolir les planchers et cloisons qui avaient fractionné le volume de la nef en cinq niveaux abritant des dortoirs et des ateliers. Puis j’ai rétabli les calottes des coupoles, ainsi que les arcatures aveugles, qui avaient été ajourées pour éclairer les pièces du rez-de-chaussée.

 

Quant aux cuisines romanes, cette architecture atypique méritait une grande attention. Rappelez-vous que je suis héritier d’un 19e siècle où toutes les imaginations, voire élucubrations avaient couru quant à la destination originelle de ce bâtiment.

VOTRE INTERVENTION SUR CES CUISINES ROMANES A SUSCITÉ LA CONTREVERSE…

Lucien Magne : Certains ont en effet contesté la légitimité de mes interventions. Or ma démarche est pleinement scientifique ! Chacune de mes hypothèses de restitution est construite à partir d’études poussées de documents – dont des dessins aquarellés de 1699 ! – et toujours confortée par des fouilles archéologiques.

 

C’est d’ailleurs comme cela que j’ai pu retrouver le niveau d’origine du sol de la nef. Pour les cuisines romanes, les critiques m’opposaient l’état des cuisines en 1900, que le plus grand nombre supposait d’origine, et leur état après restauration, où elles sont ponctuées de multiples clochetons néo-byzantins.

Archive projet restauration des cuisines romanes

Deuxième projet de Lucien Magne, projet retenu – Service régional de l’inventaire 

CETTE ÉVOLUTION N’EST-ELLE PAS EN EFFET TROUBLANTE ?

Lucien Magne :  Mais les preuves sont devant nous ! J’ai fait réaliser un reportage photographique qui permet, au jour le jour, de comprendre l’avancement du chantier. J’ai d’abord dégagé la structure médiévale des cuisines, alors parasitée par un logement de fonction plus récent.

 

Cela m’a permis de redécouvrir deux des absidioles : c’est le moment d’une découverte majeure, celle de la toiture d’origine des absidioles, imitant l’écaille de poisson, alors qu’on les avait recouvertes d’un dôme de pierre au 19e siècle. 

 

En même temps, j’ai redécouvert les modillons, ces têtes sculptées en bas relief à hauteur des corniches, que j’ai pu reconstituer sur les parties disparues. Si j’admets que l’iconographie de ces sculptures a plus ou moins été réadaptée, j’ai respecté la structure d’origine en me servant des témoignages archéologiques du 12e siècle.

 

Enfin, à partir des relevés archéologiques, j’avais découvert des arrachements de conduits de cheminées : je les ai prolongés en y édifiant des clochetons néo-byzantins qui soulignent depuis lors l’élévation. Comme un clin d’œil aux cuisines de la Trinité de Vendôme, illustrées dans le Monasticon gallicanum [recueil de monastères bénédictins].

Bibliographie :

  • Le cabinet de l’architecte Lucien Magne et la restauration des monuments Angevins en 1900, catalogue d’exposition, Archives départementales du Maine-et-Loire, 17 Septembre-12 Novembre 1999.
  • L’œuvre de Lucien Magne à Fontevraud, un des premiers architectes à restaurer Fontevraud. Monographie de deuxième cycle de l’Ecole du Louvre, 1996-1997.

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L’entrée à l’Abbaye royale et au musée d’Art moderne est gratuite pour les moins de 18 ans et les étudiants de moins de 25 ans.

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